De la rosée, des rires et un stylo
- Julie Kolly
- 12 avr.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 13 avr.

Ce matin-là, j’étais un peu nouée. Tu sais, cette sensation qui serre légèrement la poitrine sans raison vraiment tangible.
Pas une angoisse immense, juste cette tension discrète qui s’invite quand on se lance dans une collaboration, quand on ne connaît pas encore la personne, quand on veut que tout se passe bien… et qu’on ne sait pas encore si ce sera le cas.
Je me levais tôt — très tôt, pour attraper la lumière que j’aime tant, celle qui effleure tout doucement le monde quand il dort encore.
C’était un projet que je portais depuis un moment : un shooting de style elopement, quelque chose d’un peu sauvage, d’un peu libre, de très simple, au lever du soleil. J’avais repéré une petite chapelle, perdue au calme. Il y avait des champs autour, et l’idée était d’y capter cette lumière dorée qui caresse les herbes, encore perlées de rosée.
Le ciel était parfaitement clair. Il faisait frais — juste ce qu’il faut. Assez pour ressentir l’air sur la peau, pour respirer profondément, pour se sentir vivant·e. Ce genre de matinée où le silence semble plus dense, plus présent, presque bienveillant.
Une rencontre qui allège
Quand elle est arrivée, je l’ai tout de suite sentie ouverte. On a commencé à parler naturellement, comme si on s’était déjà croisées quelque part.
Elle avait ce quelque chose de solaire, de sincère, et très vite, la nervosité que je portais s’est effacée. On a parlé de tout et de rien. De nos parcours, de nos envies, de notre rapport au monde et au travail. Et en quelques minutes, j’ai su que je m’entendrais bien avec elle.
C’est rare, mais quand ça arrive, ça change tout : le lien rend les photos plus vraies, plus libres.
Je ne le savais pas encore, mais cette séance allait non seulement me marquer… elle allait aussi ouvrir des portes que je n’aurais jamais imaginées.
Un livre de pain et un prénom écrit à l’ancienne
Pendant qu’on commençait à photographier, une silhouette s’est approchée. Un homme âgé, seul, observait la scène à distance. Il n’était pas intrusif, juste… curieux. Présent. Gentiment attentif. Je me suis sentie regardée, mais sans pression. Il n’y avait pas de jugement dans ses yeux. Juste une sorte de tendresse tranquille, comme s’il était heureux de tomber là-dessus, un matin d’été.
Puis il s’est avancé, a pris la parole doucement, et m’a demandé mon contact. Il voulait le donner à quelqu’un qui cherchait une photographe pour un mariage.
Il m’a dit : « Je sens que vous faites ça avec cœur. » Je n’oublierai jamais ce qu’il a fait ensuite. Il tenait dans la main un livre de pain, encore tiède, dans son emballage de papier brun. Il a fouillé dans sa poche, sorti un petit stylo, et a noté mon nom et mon numéro sur l’enveloppe du pain. C’était un geste simple, presque banal. Mais il m’a touchée profondément.
Ce moment-là a rempli ma matinée d’une forme de douceur rare, de celle qu’on ne fabrique pas, de celle qu’on reçoit comme un cadeau inattendu.
La course et les champs
Une fois le calme revenu, on a repris la séance. Elle m’a suivie dans mes idées les plus spontanées, les plus instinctives.
À un moment, je lui ai demandé si elle accepterait de courir à travers le champ, au bord de la petite église. Elle a dit oui sans hésiter. Elle a couru, légère, les cheveux au vent, et j’ai déclenché, portée par l’élan du moment.
C’est dans ce genre d’instants que la magie se crée. Quand on ne réfléchit plus. Quand on ne contrôle pas. Quand on vit, tout simplement. Et grâce à elle, à cette confiance, à cette liberté, j’ai pu créer des images qui m’ont profondément portée.
Certaines ont rejoint mon portfolio. D’autres m’ont amené de nouveaux projets, de nouveaux visages à rencontrer, de nouvelles histoires à raconter.
Ce qu’il reste de cette matinée
Il reste d’abord une lumière. Celle du matin, douce et dorée. Celle qui n’existe qu’à ce moment précis de la journée, quand le monde hésite encore entre nuit et jour.
Il reste une jeune femme, avec qui je garde toujours de très bons contacts. Quelqu’un qui a accepté, sans réserve, de se prêter au jeu, d’ouvrir une porte.
Il reste un vieil homme, un peu comme un ange discret du quotidien, avec sa gentillesse silencieuse et son pain sous le bras. Je ne sais pas s’il a vraiment donné mon contact, mais ce qu’il m’a donné ce jour-là, c’est un souvenir gravé.
Il reste un souffle d’élan, une sensation de gratitude pour ce métier qui me permet de vivre des choses aussi simples, aussi belles, aussi vraies.
Ce matin-là, j’étais un peu anxieuse. Et je suis repartie le cœur rempli. Comme quoi, les plus belles séances ne sont pas forcément les plus préparées, les plus "prestigieuses" ou les plus parfaites.
Ce sont souvent celles où la vie s’invite dans les détails. Dans une conversation naturelle. Dans une course dans un champ. Dans un prénom griffonné sur un papier de boulangerie.
C’était une matinée spéciale. Avec des personnes spéciales. Et je sais que je m’en souviendrai longtemps.
Je suis photographe en Suisse romande, basée à Gumefens, et je me déplace pour créer des séances qui vous ressemblent.
Si vous cherchez une séance simple, humaine, à votre rythme, vous pouvez me retrouver sur Instagram @ekiarts ou via le formulaire de contact sur mon site.
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